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Un commentaire :

  Accueil   © Christian Poulin 2024
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Samedi 11 juin

 

Boubous, jeunes filles à tresses multicolores, hommes d’affaires en costume sur mesure, nous ne sommes que quatre européens, hormis l’équipage belge. Tout le monde rejoint comme moi Bruxelles pour une autre destination africaine. Je lis dans Libération, l’histoire de Mohamed Bouziri, le jeune tunisien qui s’est immolé à Sidi Bouzid. Tout était faux: la policière Fayda Hamdi ne l’a las giflé; il n’était pas diplômé. Seulement là-bas le téléphone portable a colporté l’information. Faut-il leur en vouloir d’avoir tout inventé? La Tunisie va mieux sans Ben Ali. Les journalistes ont encore été pris dans les filets du buzz.

 

Est-ce que travailler m’amuse encore un peu. Je ne sais pas. Je n’arrive à me décider. Même à la Forbe une partie de mon temps est consacrée au travail, pour Anne, Véronique ou m2i. Il n’y a vraiment qu’à Cadaqués que toute relation avec le travail est rompue. Je ne me vois pas partir de m2i pour me retrouver avec Véronique. Les statistiques de Pantaléon sont plus drôles que celles de la vie. J’ai 61 ans et je dois bien pense qu’il en reste une vingtaine. C’est long et c’est court. Autant que le peu (ou le de moins en moins) d’enthousiasme à aller travailler, c’est cette vérité qui me fait réfléchir.

 

Jus d’orange et Grany Fruits des bois au petit déjeuner du Paris-Bruxelles. Une épaisse couche de nuage masque la France … ou la Belgique. Comment savoir, vu du ciel la différence n’est pas perceptible.

 

Ultime réplique à la fin du portrait de Gérard Chaland en der de Libération: «Comment as-tu pu vendre ton unique vie pour si peu». Ça incite plutôt à s’arrêter de bosser pour profiter de cette unique vie!

 

Aéroport de Bruxelles. 19°, temps couvert. Pourquoi ne suis-je pas en train d’arroser mes tomates. Seul Le Soir est présent à l’entrée de l’avion. En dernière page, une brève sur un contorsionniste qui se cachait dans une valise pour piller celle des autres. En supplément un cahier sur les six mois de non-gouvernement.

 

Mon voisin s’appelle Zhou. Il est né dans Hunan en 1968, son visa est de 90 jours et a été délivré à Pékin. Je le sais parce qu’il m’a demandé de remplir sa fiche d’immigration. Il ne parle ni anglais, ni français. Je lui ai indiqué où il devait signer et a dessiné trois idéogrammes. Aussitôt la dame assise dernière moi me tend son passeport et sa fiche, déjà en partie remplie. Elle a confondu date de naissance et date de délivrance du visa. J’appelle l’hôtesse pour avoir une autre fiche. «C’est toujours comme ça sur ce vol». Elle s’en occupera elle-même après l’apéritif.

 

Nous sommes entre Rabat et Casablanca, aux larges des côtes marocaines quand on nous apporte le café. Le commandant de bord en profite pour nous annoncer des turbulences. Pas de mimine à tenir. Monsieur Zhou a les yeux rivés à son mini-téléviseur.

 

J’ai lu quelques page du guide sur la Guinée sur l’iPad. C’est assez agréable. J’ai commencé «L’homme qui voulait vivre sa vie» de Douglas Kennedy. J’ai laissé un de ses romans fétiches dans le tiroir sous le lit; c’est pour Berthon. Mes yeux clignent; j’abandonne la lecture.

 

16h40: le commandant annonce l’atterrissage à Conakry puis se reprend. Nous arrivons à Benjul en Gambie. Une heure d’escale. Du hublot on ne voit que le tarmac entouré d’herbes jaunies. L’avion «Republic of Gambia», sans doute celui du président, est garé en bout de piste. Le président de la Guinée n’a pas d’avion. Il y a toujours plus pauvre.

 

L’avion s’est vidé de la moitié de ses passagers. Des femmes et des hommes sont venus faire le ménage. Dès leur départ, les hôtesses parcourent la carlingue en pulvérisant pour se «conformer aux règlement sanitaires en vigueur» un insecticide qui redescend lentement sur les passagers.

 

Conakry n’est lus qu’à 553 kilomètres. J’ai remonté ma montre de deux heures. Il faudra que je regarde sur une carte le nom du fleuve que nous survolons. On aurait dit un mille-pattes ondulants, tout en courbes, méandres et affluents.

 

17h05 heure locale, Conakry. Le commandant de bord annonce 31°. L’air est saturé d’humidité. On est moite dès la sortie de l’avion. J’ai laissé quelques euros à un faux chauffeur. Dans le doute, j’ai appelé Jean Miot qui m’indique être sur le chemin de l’aéroport. Je revois mes deux arnaqueurs et leur souhaite une bonne journée. Ça fait partie du jeu.

 

De l’aéroport à l’hôtel, c’est l’Afrique, comme en Sierra Leone. Des baraques tout le long de la route. Les premières sur plusieurs centaines de mètres de deux côtés de la route vendent les mêmes armoires. Chaque baraque semble être une échoppe; restaurant, coiffeur, vendeur de piles… Des décharges à chaque coin de rue, des taxis qui slaloment en klaxonnant, partout des terrains de foot improvisés. A l’hôtel je découvre les joies des coupures d’électricité. Ce sera plus grave au journal. Plusieurs fois par heures pour quelques secondes ou quelques minutes, le noir total. Les TV s’éteignent, puis tout revient comme avant. Plus personne évidemment ne s’en affole.

 

J’ai les deux premiers numéros du Nimba. Je ne reconnais pas ma maquette. Il n’a que 24 pages mais est bien imprimé.

 

Dimanche 12 juin

 

J’ai mis le réveil à 7 heures mais mon téléphone est resté à l’heure de Paris; ll était donc 5 heures! Ma chambre est située face à l’océan. Deux heures plus tard, je frappe à la porte de la chambre de Jean Miot. Nous descendons prendre le petit déjeuner. Il continue l’état des lieux commencé hier au dîner. Mon travail n’aura donc rien de technique. 8h15 Sékou, le chauffeur du PDG, vient nous prendre, direction le Nimba.

Les rues sont vides. Bien que la population soit à majorité musulmane, le dimanche reste le jour de repos. Sept étages plus haut (Jean Miot est aussi gros de Noc, mais plus alerte même s’il monte les marches une à une). Je découvre la rédaction. Surprise, la climatisation fonctionne et me remet de la suée de la montée. Je découvre les locaux: une grande salle de rédaction avec 3 Mac, 2 imprimantes, 1 serveur, une borne Wifi. L’espace est complété par 3 bureaux, une cuisine et un WC.

 

Nous sommes les premiers. Jean Miot m’a recommandé de vouvoyer tout le monde. Le dernier, Pounthioun, arrive à 16 heures. Engueulades avec Jean Miot qui finira par le nommer rédacteur en chef en fin de journée sous les applaudissements des autres journalistes. Tout est à faire: le chemin de fer, les pages, des formations InDesign à Emmanuel et Sidibé. On leur avait promis 2 mois de formation; ils ont eu 4 jours.

 

17 heures Jean Miot part. Dernières recommandations. Me voilà seul aux commandes. L’électricité se coupe toutes les dix minutes sans rapport avec l’orage qui vient d’éclater. Je relis les papiers, coupe, fais les maquettes. Je vais une pré-maquette dans InDesign avec du faux-texte à la bonne longueur, puis dessine un rough.

 

Dès le lendemain, je prendrai les vrais textes pour élaborer une maquette avec quelques styles et imprimerai pour les gens du montage. Je comprends tes problèmes: à peine une page et demi pour deux. Je trouverai une solution le soir à l’hôtel. Pour la une, Jean Miot a suggéré un montage entre une vieille installation électrique et un pylône tout neuf pour illustrer les promesses du Medef français. Je fais le montage. 21h15 Sékou me ramène à l’hôtel.

 

Hier j’ai testé la carpe rouge; ce soir steak de thon. Je mets mon réveil à l’heure guinéenne. Ça va être plus difficile sans Jean Miot qui n’hésite pas à bousculer tout le monde, faisant sien le mot du Docteur Alpha Condé, le président, mais on dit Docteur: «La Guinée n’est pas sortie du colonialisme». Je suis le seul blanc au Nimba.

 

 

Lundi 13 juin

 

145.000 GNF, le petit déjeuner. Pour 1€ on a un joli billet de 10.000 francs guinéens. On est millionnaire avec 100€!

 

8h30 j’appelle Sékou qui me salue d’un «Bonjour patron». Il est coincé dans les embouteillages. Deux clients chez un coiffeur dont le salon consiste en deux sièges disposés dehors, le tout couvert par une simple bâche. Des petits restaurants préparent le charbon de bois. Cela me fait penser aux statuts de l’expo de ta copine Anne. La pharmacie s’appelle «Ça manque pas». A nouveau les 7 étages. Dans 15 jours j’aurai la forme d’un champion olympique!

 

Aujourd’hui il y a tout le monde: les administratifs et les personnes qui s’occupent de la mise en place avec leur chemise aux couleurs du Nimba. Pounthioun a abusé de la bière et dort sur sa chaise. C’est pourtant lui qui doit relire et titrer toute la copie. Le pigiste sport a disparu. On comptait sur lui pour 5 pages. Finalement il réapparaîtra en fin de journée. Entre temps j’aurais fait une page sport international. Je laisse un trou dans mes deux pages Monde en Bref et Afrique en Bref. J’attends les dernières dépêches de l’AFP dont une sélection arrive par mail deux fois par jours.

 

Je m’emmêle un peu dans les articles à fournir au montage: ça passe par mail, par clé USB, par le serveur. Plusieurs articles sont regroupés dans le même fichier… Je créée des dossiers sur le serveur pour placer articles et photos. Emmanuel comprend tout de suite, mais Sidibé est plus lent à cette nouvelle organisation.

 

Les deux opérateurs PAO passent leur temps à déplacer les palettes. Tous les blocs sont chaînés, même s’il n’y a pas d’habillage. Tous les blocs sont d’abord des blocs images dans lesquels ensuite ils placent le texte. Pas d’alignement sur la grille. Ça flotte en bas de page. Encore un montage photo pour le sport: deux portraits à arranger côte à côte. Il y a des portraits dans toutes les pages, mais il y a aussi beaucoup d’interviews. Je vais essayer d’aborder le sujet au prochain comité de rédaction.

 

Indigo, le régisseur publicitaire n’est pas venu. Il n’y aura que 4 pubs comme dans le numéro précédent. Mais Keïta , l’administrateur était ce matin à la présidence de la République. Le gouvernement va confier des pubs institutionnels (appels d’offres) au Nimba. L’ONU qui a de gros programmes en route en Guinée aussi. Mais je crains qu’il ne faille saisir les textes et tout mettre en forme. Je ne suis pas sûr que l’équipe soit assez nombreuses pour cela.

 

Je passe la commande à l’imprimeur. On baisse un peu le tirage; 7500 au lieu de 8000. Il n’y a pas vraiment de circuit de distribution. 21h30, Sékou me ramène à l’hôtel. Je choisis des queues de camerons (sorte de grosse gambas) marinées au curry. Très bon, peu copieux, 210.000 francs guinéens. Trop tard pour avoir un dessert. Je repars avec ma bouteille d’eau. Quelques réussites sur l’iPad. Dodo.

 

 

Mardi 14 juin

 

L’orage m’a réveillé cette nuit vers 5h30. Impossible de me rendormir. De la ma fenêtre je vois les pêcheurs partir au large en pirogue, croisant quelques vieux transporteurs. Dans la salle du petit déjeuner des chinois, un anglais avec son iPad, un espagnol, sourire aux lèvres, qui pourrait bien être celui que j’ai croisé hier dans l’ascenseur avec une jeune et belle guinéenne. Difficile de ne pas penser à Nafissatou Dialo, originaire de Guinée, dès qu’on croise une femme de ménage ou qu’on croise un blanc avec une femme noire. Un seul couple ressemble à des touristes: short, chemise ouverte; loin des costumes ou autres tenues plus strictes.

 

Sékou vient me prendre à 9h00. Je regarde les noms des boutiques. Un carrossier a appelé la sienne : «Sans gratte, sans casse». On discute ethnies: les sousous, les peuls et les malinkés. «Peul méchant» tranche Sékou.

Les étages me semblent plus faciles à monter aujourd’hui. Le journal avance lentement, mais il avance. Sidibé dort sur son Mac.

 

C’est la journée la plus longue. 20h30 l’électricien est là. La Canon qui imprime les pages en A3 est toujours sans courant. L’équipe corrige sur des A4. Je tombe un peu de sommeil. Il sera trop tard pour dîner ce soir à l’hôtel. J’espère que je trouverai un moment pour aller manger dans le coin.

Il y a pas mal de choses à améliorer sur les gabarits et les styles. On verra cela pour le prochain numéro. Pour l’instant, l’important est de corriger les pages et de faire la une. Engueulades, menaces de retirer un papier si le sous-titre de Une n’est pas changé. Le rédacteur en chef nommé par Jean Miot refile le bébé à Niane, en principe directeur de la rédaction. L’administrateur s’en mêle. On verra bien qui aura le dernier mot. Et le courant électrique qui peine toujours à revenir…

 

Mon compromis semble avoir mis tout le monde d’accord: j’ai suggéré de supprimer la dernière ligne!!!

Je fais quelques photos du balcon. On voit la mer, le marché, un terrain vague reconverti en garage. Juste au-dessous, des baraquements en tôle sur lesquels sèchent le linge fraichement lavé.

 

La nuit arrive. Dans quelques minutes toute la ville sera dans le noir. Seuls quelques quartiers ont droit à l’éclairage publique. Ça me rappelle Zanzibar ou Freetown en Sierra-Leone, mais sans les bougies le long des trottoirs.

 

23h. Emmanuel a fini les PDF. Il a laissé des erreurs «Images introuvables». Son collègue Sidibé a tendance à les laisser sur son poste plutôt que de les placer sur le serveur. On verra bien demain si ça pixélise. Keïta exhorte le responsable du groupe électrogène à nous conserver du courant jusqu’à l’envoi des pages à Casablanca. Sékou s’arrête pour acheter quelque chose à manger dans un petit restaurant, le Modito. Une petite fille dort derrière le comptoir. Pour 20.000 GNF j’ai un gros hamburger poulet que j’ai commandé sans épices. 20.000 ça fait 2 euros. Les Tamouls sont battus. Dans les rues, je n’arrive pas à faire la différence entre les maisons, sans doute trop petites pour que tout le monde tiennent à l’intérieur et des petites échoppes. A tous les carrefours, on propose à manger. La plupart du temps, une table éclairée avec une mèche enfoncée dans une bouteille.

 

 

Mercredi 15 juin

 

Par habitude, je me suis réveillé à 5 heures. Mais j’ai pu me rendormir. Quelques gouttes de pluie font des ronds dans l’eau de la piscine. Je règle mon téléphone local. Parmi les réglages celui des heures de prières. Le journal télévisé s’ouvre sur un décret du Docteur/Présiendet Alpha Condé. «Vu le décret 2010 / SG / 09 / PRG du 27 décembre … La présentatrice prononce tous les mots

«Vu le décret 2010 barre SG barre 09 barre PRG…». Donc le président a nommé M. Touré directeur des garages du gouvernement.

 

Sékou doit me prendre à 14h30. Je profite de la matinée pour reprendre les pages du dernier numéro et faire du ménage dans les styles. Sédibé a monté une page dans un gabarit! Pas le temps d’aller à la piscine, mais j’ai pris mon premier vrai repas de midi à l’hôtel. Café-cigare sur la terrasse au-dessus de laquelle planent des vautours. On en voit souvent tournoyer au-dessus de Conakry. Pour la première fois, j’ai chaud. Chambres, bureaux, voitures sont climatisés. Le soleil tape fort. C’est marée basse. On peut aller à pied jusqu’au petit phare que je vois de ma chambre. Je n’ai pas encore vu de moustiques. Pourvu que ça dure.

 

Malgré cette matinée plutôt calme, je me sens fatigué. J’au reçu un coup de téléphone de Jean Miot me suggérant de rester jusqu’à la fin du numéro 5 ce qui me ferait partir le 29 ou le 30. Je me suis empressé d’envoyer un mail à Virginie pour lui dire que je m’en tenais aux dates prévues. Il faudra bien qu’ils y arrivent tout seul.

 

14h30 pétantes, Sékou est à la réception de l’hôtel. A cette heure, la ville est très embouteillée. On avance lentement au milieu des taxis jaunes, les fous-furieux du volant, des mini-bus où le nombre de passagers dépassent largement la douzaine de places assises. Des femmes et des enfants portent sur leurs têtes toute sorte de produits: glaçons, cigarettes, mangues, stylos… Un fantôme de feu tricolore orne le carrefour où un vieux monsieur plus gradé qu’un maréchal assure la circulation. En arrivant au Nimba, un musulman étend son tapis de prière. Bonne nouvelle, on répare l’ascenseur.

 

La rédaction est quasiment vide. Le journal ne sera livré à Conakry que cette nuit. Le mercredi est le jour de repos. Je continue mon nettoyage. Je refais l’horoscope et cherche des jeux gratuits. Je trouve un générateur de grilles de Soduku. Je fais une charte avec les quelques styles que j’ai conservés. Je prépare des formats de pub. Une personne arrive de Paris, samedi, pour s’en occuper.

 

19h. Je ferme le bureau. Sékou doit faire le plein d’essence mais n’a pas d’argent. On passe chez M. Faye, l’administrateur. Il est absent. Je rencontre sa fille, sa femme, sa seconde femme et les 3 enfants de celle-ci. La loi autorise jusqu’à quatre femmes à condition d’avoir 4 maisons. Sékou glisse son pouce sur son index. Ça coûte cher la polygamie. Je laisse 200.000 francs guinéens à Sékou pour l’essence. Il me rapportera la note demain.

 

Ce soir poulet grillé et mariné à la diable. Naby, un des rédacteurs, m’appelle pour me demander de mes nouvelles. Il n’est pas trop tard pour un dessert: salade de fruit et tarte coco.

 

 

Jeudi 16 juin

 

Les rues sont propres. Les ordures ont été entassées à chaque carrefour. On passe devant la pharmacie «Plateau de la sagesse». On croise un groupe d’écoliers dans leur costume beige.

 

Mauvaise nouvelle: le journal n’était pas dans l’avion de 5h. Il a été imprimé, mais le transporteur à Casablanca ne l’a pas porté à l’aéroport. Tout le monde est déçu d’autant que nous avions bouclé à l’heure.

 

Je refais l’horoscope. Je monte le tableau des tarifs de pub. J’explique à Emmanuel et Sidibé les changements que j’ai fait dans les styles et gabarits. C’est la première fois que je fais un peu de formation sur InDesign; bibliothèque, alignement sur la grille, habillage…

 

Un orage assombrit la ville. En quelques minutes les rues sont inondées. Niane m’explique que tout le monde a bâti n’importe où bouchant les égouts.

 

15h30. On décide de plus attendre les autres journalistes pour commencer le comité de rédaction. On ne connait pas encore le volume de pub. On part sur 24 pages. J’étais un inquiet pour le contenu, mais finalement les sujets abondent et il ne devrait pas y avoir autant d’interviews que dans le précédent numéro. Sidibé, le deuxième monteur PAO est chargé de faire un article sur les inondations et de récupérer des photos. Les pluies, dans son village, ont fait de nombreux dégats et les caïmans se sont retrouvés sur la route.

 

Naby propose un sujet sur les enfants qui travaillent dans les mines. Je lui suggère de faire beaucoup de photos. Peut-être l’occasion de casser une maquette un peu répétitive. Deux sujets peuvent faire la une: la flambée des prix ou le don du sang. Les autorités ont oublié de commander les poches de conservation. En sport, un des sujets sera autour de l’équipe de pétanque qui n’a pas pu partir parce que le ministre, absent, n’a pas signé l’ordre de leur départ pour le Cameroun. En culture un sujet sur Nimba la déesse de la fertilité dont une très belle représentation est exposée à l’hôtel. J’ai pris la photo avec mon téléphone.

 

Le comité se termine pas une liste de revendication: payer les déplacements, embaucher des pigistes, avoir à manger et à boire les soirs de bouclage, installer une cloison pour isoler la rédaction…

 

Journée assez calme. J’appelle Félix pour avoir des nouvelles du futur marié. Je le rassure sur le fait que tu ne t’en moques pas. Il me rassure en me disant que sont frère se dé-pacse uniquement pour pourvoir avoir le RSA. On verra bien. Il y a un peu trop d’arrêtes dans la dorade. Je monte me coucher.

 

 

Vendredi 17 juin

 

Sékou est en tenue «locale» avec chemise col indien et pantalon, jaune/orange avec des broderies. Il est musulman et ira à la mosquée cet après-midi. A l’hôtel d’autres personnes sont en boubous. J’en repère un très joli en vert. Je pense qu’on ferait un joli couple toi avec la tenue bleu, moi avec la verte. Félix m’a dit que je pourrais m’habiller comme je voulais pour son mariage.

 

Bonne nouvelle: le journal a été acheminé jusqu’à Conakry. Je le feuillette rapidement.

 

Il y a que Niane à la rédaction. Jean Miot m’a demandé de collecter les adresses mails de tous les journalistes. Naby me donne le sien: kalebombo. Il m’explique que dans les années précédentes, quand il travaillait au Lynx, les journalistes ne pouvaient pas signer de leur nom. Tous signaient avec des pseudonymes. En soussou, Kale veut dire «plume» et bombo «taper».

 

Monique arrive avec des beignets de poisson, m’en offre un sans me prévenir qu’il est bourré de piments. Le montage n’a pas encore commencé.

Je fais des cartes de presse. Je prépare des bouche-trous et des graphiques dans Illustrator sur les exportations de matières premières: cacao, coton, huile de palme, café. Pratiquement tous les chiffres sont en baisse par rapport à 2009.

 

Je corrige le journal. Quelques erreurs de montage, des capitales où il n’en faut pas et inversement, mais rien de dramatique. De retour à l’hôtel j’achète les journaux locaux: Le Lynx, Le Démocrate, La Lance et L’Indépendant. Ils ressemblent tous aux journaux camerounais, sorte de Canard Enchainé. Par contre certains ont beaucoup de pub, trop même. Le Lynx en a 12 ½ sur 24 pages. J’ai également trouvé le Monde daté samedi-dimanche.

 

Je suis rentré assez tôt pour aller à la piscine. Peu de monde à cette heure là. Deux allemands ou hollandais, body-buildés et couverts de tatouages. Pounthioun m’appelle pour m’annoncer qu’il rapportera une demi-page culture. Il m’avait déjà appelé dans l’après-midi pour une tribune. Au bureau je ne comprends pas tout ce qu’il dit . Alors par téléphone…

 

Ce soir, au son d’un orchestre saxo-jazzy, poulet tandori pour me rappeler notre quartier. J’ai déjà fait le tour de la carte. Dans la chambre, la note des premiers jours m’attend: 10.863.000 GNF; ça fait quand même un peu plus de 1000 euros!

 

Mon frère m’a envoyé un message suite à un incident avec son ordinateur. Les messages sont en anglais. Il ne sait pas comment réagir. Je lui demande des nouvelles de Tiny. Voici sa réponse:

 

Tiny: comment dire, rien n’ est prévisible. La semaine dernière, à part «oui ou non» que l’ on pouvait deviner, ses «paroles» étaient incompréhensibles et il était impossible de communiquer. Cette semaine elle s’ exprime beaucoup mieux (mais j’ y vais tout à l’ heure et quant sera t’ il aujourd’hui). Elle a une vision déformée de la réalité, ou  des «hallucinations», elle cherche à attraper des objets imaginaires ou alors des objets présents mais qu’ elle situe ailleurs que là où ils sont.

De quoi se rend elle réellement compte? Dans quel monde (mondes) est elle? Elle ne se plaint pas et elle ne souffre pas.

Voilà, c’est pas facile à vivre.

 

Je me doute que ce n’est pas facile à vivre. Quoi répondre?

 

Fabrice m’a aussi demandé de mes nouvelles. Plein d’humour, il me demande si c’est en Guinée qu’a été inventée la Guiness. Je lui répond qu’ici on peut boire de la bière Guy Lux. En réalité elle s’appelle la Guiluxe.

 

Je finis la lecture du journal. Il faudrait quand même que j’ai tout lu pour demain.

 

 

Samedi 18 juin

 

L’ascenseur n’aura fonctionné qu’une journée. Il faut donc monter les 7 étages. Sur le palier du 4e, un ouvrier juché sur un tonneau, faute d’escabeau, remplace les ampoules. C’est un bonne idée, car le soir les 3 derniers étages étaient sans éclairage. Je ne pouvais avancer qu’en me tenant au mur.

 

Personne à la rédaction. J’espère qu’ils sont tous en reportage. Je continue ma formation avec Emmanuel. Il a tout de suite compris l’avantage de la grille. Mais pour faire rentrer le texte, il ajoute ou supprime des retours-paragraphes. Comme je crains un peu pour la maquette, je vais faire des pages modèles. J’ai relu le texte de Niane pour les pages infos locales. Il garde un style très polissé avec de M. partout. Dis-moi si je me trompe, mais on ne met pas l’abréviation de Monsieur quand on cite le prénom (François Fillon et non M. François Fillon). On ne met le M. que si le prénom n’est pas cité (ou qu’il prête à confusion sur le genre ?). Je n’ai pas trouvé d’explications claires dans le «code typo que j’ai apporté.

 

17h. Avec Sékou, nous partons accueillir Stéphane qui va se charger de faire rentrer la pub. C’est samedi; des terrains de foot improvisés avec des mini-buts envahissent tous les espaces libres. Nous croisons un noir albinos, qui, contrairement à d’autres pays, ne semble pas mal traités en Guinée. La route Nationale 1 qu’il faut emprunter pour aller à l’aéroport est à l’image de mon souvenir du premier jour. Les «taxi-vite» nous doublent à toute allure. Tout est d’une misère affligeante. Un va-et-vient incessant des colporteurs qui passent d’un côte à l’autre de la route (les grilles qui séparaient les voies ont été arrachées), des boutiques qui vendent de tout, de rien (comme ce stand où ne sont posées que 4 antennes de télévision). La route est pourtant bordées d’acacias et de flamboyants ce qui pourrait faire un joli paysage, mais tout le reste manque: l’électricité (dont les coupures ne me surprennent plus), les ordures, les caniveaux (quand il y en a) bouchés… dans un pays si riche (bauxite, fer, uranium…).

 

A l’aéroport, Sékou me désigne des groupes de Peuls, dont certaines femmes sont entièrement voilées de noir. On en voit pratiquement pas à Kaloum, le quartier de Conakry qui jouxte la mer. Ils se sont regroupés dans un quartier proche de l’aéroport. Sékou _qui m’avait déjà dit qu’il ne les aimait pas_ m’explique qu’ils lui font payer le riz plus cher parce qu’il est sousou. Une touriste esseulée attend. Deux hommes se saluent en se frappant tempes contre tempes. L’enfant d’une femme est aussitôt enlevé par, je suppose, sa grand-mère qui le brandit comme un trophée.

 

Nous nous arrêtons chez un assureur, que Keïta, l’administrateur du Nimba, espère avoir comme annonceur. Belle maison, grand jardin, tonnelle meublée de canapés. Ils sont une dizaine autour de la table. Pilons de canards rôtis et bière Guiluxe. L’assureur a vécu 17 ans en Virginie aux USA et n’est revenu que depuis l’élection d’Alpha Condé. Il pleut. Retour au journal à la nuit tombée.

 

Deux enfants entièrement nus dansent à un carrefour. La rue du Nimba est déjà recouverte par 5 bons centimètres d’eau. Keïta retient Stéphane jusqu’à 21h30. Je regarde la TV avec Sékou. La présentatrice de la une semble figée. Seule, ses lèvres bougent. Il y a deux chaînes de télévision en Guinée. La première émet en français, la deuxième en kibaro, mélange de sousou, malinké et peul. L’enseignement est en français, mais c’est le kibaro qui permet à tous les Guinéens de se comprendre.

 

Retour à l’hôtel. Le restaurant est fermé. Club sandwich au bar. Je regarde Potiche avec Catherine Deneuve. J’ai bien ri. Depardieu a encore doublé de volume.

 

 

 

Dimanche 19 juin

 

Il pleut. Autour de la piscine, à l’abri, des joueurs de tennis attendent l’accalmie. Mais ce n’est plus un orage comme hier soir, mais une pluie bien établie, comme c’est fréquent en Puisaye et qu’on sait que la journée se passera au coin du feu.

 

Je croise dans l’ascenseur le coréen qui cherchait le cireur de chaussures. Absent le dimanche. Quelques mots d’anglais pour savoir s’il est en Guinée pour le business. “Il faut bien manger“ me répond-il. Je suis bien incapable de faire la différence entre un coréen et un chinois.

 

Des femmes nettoient les rues avec des balais en «paille de riz». Avec Stéphane, nous sommes les premiers. Aucun journaliste ne passera au bureau. Je les ai appelé un par un. Tous ont remis à lundi leur présence au journal. Quant à Pounthioun, le rédacteur en chef, il n’a pas donné signe de vie depuis 3 jours. Jean Miot pense à Monique. Je pencherais pour Emmanuel, le maquettiste qui à l’avantage d’être le plus présent et qui peut donner du rythme.

 

J’ai fait une plaquette pour la pub, commencé les pages internationales, monté une page culture. Bref pas grand-chose. Un dimanche un peu terne. J’ai réussi à photographier un vautour. J’attendais la fête d’un mariage qui se célébrait au pied de l’immeuble du Nimba. Rien d’autre que le haut-parleur diffusant des percussions de djembés. Ce sera pour cette nuit.

 

Retour à l’hôtel avec l’inquiet sentiment que le journal n’est pas plus avancé que samedi. Il ne nous reste que deux jours pour boucler. Avec un journaliste de moins, ça va être chaud.

 

Les infos télévisées évoquent les tas d’ordures qui encombre le marché de Matoto sur la route de l’aéroport. En passant hier en voiture, j’avais bien remarqué l’état lamentable du plus grand marché de la capitale. Les images montrent une femme allaitant son bébé au milieu des immondices. Je le note pour le proposer comme sujet.

 

Je baille. J’aimerais un peu plus d’action.

 

En ouverture culture, un article sur Nimba.

 

Par sa magnificence, Nimba constitue un hommage à la grandeur d’âme et à la fierté ethnique qui avaient alors droit de cité. Nimba représente l’idéalisation du rôle de la femme dans la société. Elle n’était tenue ni pour une divinité ni pour quelque autre pur esprit (comme c’est couramment le cas dans l’art africain), mais pour l’image de la femme au zénith de sa puissance, de sa beauté et de sa présence affective.

Esthétiquement, elle évoque une mère qui a donné naissance à de nombreux enfants et qui les a préparés à vivre un âge adulte fécond. Ses mamelles plates et pendantes témoignent de l’abnégation avec laquelle elle a nourri ses enfants. Ses cheveux sont tressés selon un schéma compliqué, en rangées parallèles surmontées d’une haute crête médiane descendant jusqu’à la nuque. Le tout évoque les activités agricoles, tâches particulièrement assumées par les femmes. Le visage, le cou et la poitrine sont décorés de scarifications symbolisant l’aptitude de l’espèce humaine à modifier sa condition et son cadre de vie en édifiant une société organisée à partir de la nature sauvage, exactement comme une femme s’applique à faire de ses enfants des citoyens et des individus conscients de leurs responsabilités.

Nimba paraissait publiquement dans les mariages, pour que les nouveaux époux fassent choix du bon chemin. Elle paraissait aux funérailles qui avaient pour fonction d’admettre les défunts au sein du monde des ancêtres, où ils continueraient à servir la communauté des vivants en contribuant à son bien-être. Au moment des récoltes, elle personnifiait la fertilité due à la compétence du groupe social conjuguée à l’influence des esprits et des aïeux disparus. Enfin, à l’époque des semailles et des plantations, c’était elle qui appelait à accomplir dignement la tâche difficile à atteindre de nouveaux records de productivité.[...]

 

 

Lundi 20, mardi 21 juin

 

Pas grand chose ces deux jours. Ciel gris le matin et violents orages dans la journée. Une escadrille de pélicans égaient l’écran de nuages qui recouvrent Conakry. L’eau a envahi les escaliers du Nimba.

 

Hier bouclage du journal. Je devrais dire séance d’écriture car la plupart des articles n’étaient pas rédigés. Des photos qu’on arrivent pas à extraire d’un téléphone portable, celles de la page «Vous avez la parole» sont dans un appareil photo mais il manque le câble de connexion. Des articles trop longs, contestés, coupés, changés, finalement remis. J’ai rédigé et maquetté la une, une double photo, les deux pages internationales, l’interview du président pompé intégralement sur le site de RFI, la page sport international, les graphiques de la page Eco et refait 5 ou 6 pages dans lesquels les articles étaient changés ou coupés. Toutes les cinq minutes Sidibé m’appelle. «Monsieur Miot, s’il vous plait». Tout est en vrac sur sa page. Je prends la souris pour aller plus vite.

 

Déjeuner au Buffet de la gare. Ce bistrot est le seul vestige de la gare de chemin de fer dont les rails ont été revendues depuis des années. Stéphane et moi avons essayé de remettre Pounthioun dans sa fonction de rédacteur en chef. Malgré notre discussion pendant le déjeuner, c’est Niane qui a pris les choses en main dans la soirée.

 

Il reste une semaine pour passer le relai à quelqu’un. Je crains un peu pour la maquette. Sidibé a découvert l’option «Alignement vertical justifié». Adieu la grille de base! Pas de gestion de la petite typo, peu d’italique, jamais les mêmes guillemets… Et il reste les deux pages Etranger et la récupération des photos sur l’AFP. Pas compliqué mais très long vu la vitesse du réseau.

 

Pendant qu’Emmanuel envoie les PDF au Maroc, je regarde la télévision avec Ougna, consterné du reportage de la première chaîne guinéenne. Le ministre de l’Agriculture a troqué son costume européen pour une tenue plus local avec chapeau de paille et foulard rouge. Comme la semeuse de nos anciennes pièces de 1 franc, il ensemence un champ fraichement retourné. Des dizaines de personnes, sans doute pas toutes volontaires, suivent noyés dans la poussière une machine agricole, sorte de gigantesque charrue. Le stock d’engrais fait l’objet d’une long plan séquence. Ougna, dépité, me dit que ces sacs font finir dans quelques jours sur les marchés locaux.

 

Keïta a envoyé Sékou chercher des sandwiches et de la bière comme dans un Maigret. J’ai demandé sans piment. Les autres en tartinent le leur.

 

Fin d’envoi des PDF à 1h15 du matin. En quittant le journal, nous trouvons un adolescent endormi dans le hall, allongé sur une natte. Les rues sont désertes. Pas traces de la fête de la musique. Je ne connais toujours que le trajet entre l’hôtel et le journal.

 

 

Mercredi 22 juin

 

Je me suis réveillé vers 7 heures. Bonne nouvelle, ce matin: soleil. A la table à côté, on donne du «Votre Excellence». Un ministre, peut-être.

Je profite de la piscine. J’ai repris le livre commencé dans l’avion, jamais ouvert depuis. Je t’appelle.

 

Il fait chaud aujourd’hui, un temps lourd sans vent. Sékou passe me prendre vers 11h. Visite de la ville. On commence par changer des euros. Palabres. Finalement j’ai 750.000 GNF pour 80€ et mon chauffeur échappe au bakchich que le policier lui réclame pour s’être garé en double file. Sékou me désigne les commerces, les banques, les ambassades. Arrêt au stade de foot. Il aurait du être entièrement refait, mais dès que l’argent est arrivé, l’entrepreneur est parti avec à l’étranger.

 

Nous franchissons un pont en réfection. La terre est rouge. Des vendeurs à la sauvette nous proposent des cartes de téléphone, des fruits, des parfums, des pochettes plastiques contenant de l’eau… Les 4 minarets de la mosquée Fayçal se détachent dans le ciel. Le bord de mer n’est qu’une longue bande d’immondices. J’aperçois un pêcheur, l’eau au niveau des épaules. Des chèvres paissent sur les trottoirs où sèche le linge étalé à même le sol. Sur le bords des rues en latérite tout est boutique: quatre piquets de bois et un morceau de tôle ondulée auxquels sont pendus une demi-douzaine de gros poissons rouge; un panier en osier où s’entassent une vingtaine de petits poulets; des caisses vides de Coca-Cola supporte des sacs de riz de 10k; une simple table; une paire de pneus usagés.

 

Tour de la place où trône le Silly, une statut représentant un éléphant, l’animal fétiche de la Guinée, un ballon de foot posé devant ses pattes. Le Silly, c’est aussi le nom de l’équipe nationale de football. Embouteillages, routes défoncées. Des écoliers attendent à l’ombre d’un baobab. C’est un incessant va et vient, rythmé par les «taxi-vite» et les mini-bus qui soulèvent des nuages de poussière évitant les piétons qui traversent en courant et ceux ou celles qui n’ont pour tout commerce que ce qui est posé sur leur tête: draps de bain, oranges, maroquinerie…

 

Un 4x4 de police emmène deux jeunes. Hier à la télévision, on a appris qu’une semaine après avoir bénéficié de la grâce présidentielle, un homme avait été arrêté pour vol. «Un bandit, il a cela dans le sang» a régi Ougna. Dès que notre voiture s’arrête à cause de la circulation, nous sommes sollicités par les vendeurs. Arrêt à la supérette «Bobo». Aucun produit local.

 

Sékou m’emmène au Petit Bateau, un restaurant face au port d’où est embarquée la bauxite. C’est la seule ligne de chemin de fer qui existe encore mais elle ne sert qu’à cela. La voie ferrée est bordée d’un bidonville. Cela m’e rappelle les premières images de «La constance du jardinier». Enfants à peine vêtus, flaques d’eau stagnantes, déchets et sacs plastiques.

 

Brochettes de poisson, inévitablement accompagné de riz Je commande de l’eau. Sékou prend une boisson appelée XXL, jaune/vert fluo. 100% chimique. Des enfants conduisent des pirogues. Dans le dernier numéro, Naby a fait un reportage dans les carrières de Manéah. Les photos étaient «belles». J’ai décidé d’en faire une double. Des enfants, dont certains ne connaissent pas leur âge, travaillent pour aider leurs familles, le dimanche ou plus.

 

Un lézard vert à tête jaune traverse la terrasse. Séjou est fiancé. Il n’a pas assez d’argent pour se marier. Il lui faudrait 10.000.000 de GNF.(100 euros). Il faut organiser trois fêtes: Saba, Mamaya avec des danses et offrir une valise aux parents de la mariée contenant deux boubous. Je ne suis pas sûr d’avoir tout compris.

Je retourne au journal à 15h30. Un bulletin d’abonnement à monter. Je fais le ménage sur le serveur, mets à jour les gabarits pour le prochain numéro (les deux folios gauche/droite n’ont pas la même taille). Je commence une photothèque. Pas facile. Les photos ont gardé le nom définit par l’appareil photo numérique (IMG_4534.jpg). Je reprends les anciens numéros pour les nommer. J’en suis déjà à la cinquième personne qui se nomme Touré. Keïta se rend compte qu’on n’a pas repassé le communiqué du ministère de la Pêche.

 

Dîner à l’hôtel. Les deux jeunes filles qui attendaient au bar sont invitées à une table uniquement masculine. Au bar, assises face à saladier où refroidissent des bouteilles de champagne, deux autres attendent. Le grand écran TV diffuse en boucle les nouvelles de l’Afrique. Successions de ministres ou d’opposants tous démocrates à les entendre, tous dénonçant les processus électoraux.

 

 

Jeudi 23 juin

 

Paysage de Bretagne. On ne distingue plus les îles du Loos. Tout est noyé dans la brume.

 

Le journal a été livré à l’heure. Grosse erreur dans une des pages qui a été modifiée mardi soir dans le brouhaha général: il manque le début de l’article. Pour le reste, c’est plutôt mieux que le dernier numéro. Encore trop d’articles trop longs. J’ai préparé des pages types avec 5 articles.

 

Le comité de rédaction prévu à 11 heures commence à 16h30. Monique est absente, Naby, malade, dort puis s’en va. Pounthioun, le rédacteur en chef confirmé dans ses fonctions, ne notent rien des sujets. Au tour de table, ce sont surtout le remboursements des frais qui sont évoqués. La journée a été «bouffée» par cette attente. A l’occasion d’une proposition de papier sur l’inflation, j’apprends que le change euros/GNF est meilleur si on échange un billet de 50€ plutôt que 5 billets de 10€!

 

Le muezzin appelle les musulmans à la prière. Le Damier, un restaurant situé en centre-ville, est fermé le soir. Dîner à l’hôtel. Je reprends la même chose qu’hier: poulet grillé. Je regarde une connerie sur TF1 pour m’aider à m’endormir. L’orage tonne, mais ne dure pas. J’aimerais bien faire une vraie longue nuit.

 

Sous ma porte, la note: 22 millions de GNF!

 

Vendredi 24 juin

 

La douche ne laisse couler qu’un maigre filet d’eau. Je me lave en mouillant une serviette. L’ascenseur fonctionne. Pas pour longtemps. Tous ceux qui arrivent après moi sont montés à pied. Il parait qu’il ne fonctionne que tôt le matin et tard le soir pour permettre aux habitants de sortir et de rentrer. J’en doute, ou alors ils rentrent très tard.

 

Les hommes musulmans sont en boubous. Les femmes en portent aussi, chacune d’une couleur différente. Je prépare un système pour les mots croisés. Sidibé et Emmanuel de la maquette sont là, mais pas l’électricité. Pas de serveur, pas d’imprimante, pas d’internet. On ne fera rien aujourd’hui. C’est vendredi, jour de prière à la mosquée. Les bureaux se vident vers 11 heures. L’EDF locale en profite pour faire du délestage.

 

Je fais une série de photos depuis la fenêtre. Des femmes passent, leur commerce sur la tête. Une autre change son enfant. D’autres rangent le linge. Un chien dort dans une cour. Chacun rentre chez soi, un tapis de prière roulé sous le bras. Au bureau dans ce qui tient lieu de cuisine, une femme prie. 15 heures. Inutile d’attendre plus longtemps.

 

Piscine. Je termine mon livre en sautant quelques chapitres. Pas bien écrit ou mal traduit. Des enfants plus noirs que métisses s’ébattent dans l’eau. Ils ont l’accent de Marseille. Le ciel se voile. Trois chats malingres ont pris la place des baigneurs. Leurs museaux oblongs me font penser aux chats des dieux égyptiens. Le petit cigare qui accompagne une Guiluxe pendant que je lis le Monde daté mercredi a attiré un vendeur d’authentiques cigares cubains. Toujours pas de nouvelles de mon billet d’avion. Enfin, normalement dans 5 jours, je serai parti.

 

La nuit est tombée. Deux coréens barbotent encore dans la piscine. Je remonte dans ma chambre. Je m’ennuie un peu. Ce n’est pas une ville, ni même pays, pour touristes. C’est un peu déprimant. J’ai hâte de voir tes aménagements, d’avoir des nouvelles de Félix… .

 

Filet de turbo insipide au son du Gombo Jazz, le même orchestre que la semaine dernière. Mélodies africaines, Buena Vista Social Club et l’inusable «Commande Che Guevara»

Lundi 27 juin

 

La journée commence à AirFrance. Il faut prendre un ticket pour attendre son tour. Ma voisine qui est arrivée avant moi en prend un, Nous nous les échangeons. J’appelle le responsable de l’opération Nimba à o2i. Je n’ai pas été très aimable. Il doit me rappeler dans 10 minutes. Je repars au bureau. Une heure après, acheté le jour même, j’ai une réservation à faire valider le lendemain midi si o2i n’arrive pas à s’attendre avec l’administration du journal. Côté o2i, on me dit «lenteurs africaines». Je pense plutôt «tout faire à la dernière minute pour grappiller quelques euros».

 

Cette réservation en poche, je peux me pencher sur le journal … sauf que la copie n’est pas prête. Une ½ page de pub saute que je remplace par le programme du Centre Culturel Franco-Guinéen. Il me faut au moins deux heures pour trouver des images imprimables. La recherche sur l’AFP/Photos me prend largement autant de temps.

 

Nous jouons avec Sidibé à faire des montages dans Photoshop. Je lui ai montré comment détourer, mais il ne comprend pas vraiment «ajouter à la sélection» ou «enlever à la sélection». Le panneau des pages montées restent vide. Discussion avec Keïta et Stéphane sur les problèmes de distribution. Les autres journaux sont mieux mis en vente. Sur 100 exemplaires du Nimba déposés à l’aéroport, 95 invendus. Le débat dérive sur le fait que le distributeur est un peul et que le Nimba est vu comme un journal de soutien à Alpha Condé qui est malinké. Monter son propre circuit de distribution ne semble pas être à la portée immédiate du journal. La vente dans la rue est aussi très aléatoire. Sans parler des risques de bagarres entre vendeurs.

 

Autour, la ville, la même: ses baraques en tôle ondulée; le linge qui sèche sur les toit, le terrain vague qui sert de garage, le marché caché sous une allée de parasols, les femmes qui vont et viennent leurs commerces posés sur leur têtes, les chiens errants… 21h00. Tout le monde lève le camp. Il paraît que beaucoup de papiers sont rédigés et corrigés. Les semaines précédentes, certains passaient par moi, pour relecture. Mais depuis le dernier comité de rédaction, c’est Pounthioun qui s’occupe de la relecture et doit aussi choisir la maquette, parmi les exemples que le lui ai laissé. Je crains qu’il ne prennent mes modèles au pied de la lettre, malgré mes explications sur les possibilités d’arrangement.

 

Séance Skype, hélas sans caméra de mon côté. C’était super de te voir.

 

Ce matin l’orage m’a réveillé vers 5h. Je me suis rendormi un peu. La fin approche. Mais ce soir on va se coucher tard.

 

 

 

Mardi 28 juin

 

La grande journée. Les négociations entre le Nimba et o2i n’ont pas aboutI. Le directeur du Nimba me propose un vol samedi par Brussel AirLines. Je file à Air-France confirmer mon billet. Je suis le 10e dans la queue, mais un jeune garçon me tend son ticket. Dix minutes plus tard, nous sommes de retour au journal, où le tableau des pages reste désespérément vide.

 

Il va falloir être patient. Je fignole mes deux pages Monde et Etranger. Liste des candidats aux primaires PS, Lagarde au FMI, émeutes au Sénégal. Plus la page Sport Etranger. Il y a la coupe du monde de football féminin en Allemagne. Ça me fait une photo et deux brèves. 22h, 23h, minuit, 1h; certaines pages n’ont pas encore commencé à être montées.

 

Sidibé est perdu dès qu’il faut essayer de bouger quelque chose dans une page. Il continue de créer les blocs texte avec l’outil Image. Que des blocs chaînés. Lui dicter des corrections nécessitent une patience infinie. Emmanuel lui vole la souris souvent.

 

On fait quelques photos souvenirs. Naby s’en va. Je le félicite de ses photos: il cadre bien ses sujets. Engueulades sur un papier politique, subtilité trop local pour que, pris à parti, je puisse avoir un quelconque avis.

 

Deux heures du matin. Les pages A3 commencent à sortir pour la dernière relecture. Ici où la quelques fautes d’orthographes, une page qu’on croyait corrigée ne l’est plus. Faut-il une cap aux noms des mois. Oui dit le code typo que j’avais pris avec moi; non, soutient Ougna. L’accord du participe passé nous donnent des maux de tête. A cette heure et après 16 heures de boulot, la concentration est sérieusement entamée.

 

Trois heures. Emmanuel recompte les PDF envoyés chez l’imprimeur. L’ascenseur nous attend. En bas, dans le hall, le même petit garçon dort sur sa natte. Sur le chemin du retour, on ne croise que des chiens.

 

Le voyant de ma porte reste au rouge à l’introduction de ma clé. Un instant l’idée que le check-out a déjà été fait me traverse l’esprit. Au comptoir, on re-magnétise ma clé. Je m’endors dans la minute.

Mercredi 29 juin

 

J’attends Sékou. Ni le Wiki de l’hôtel ni ma clé 3G ne capte. Mon téléphone est coupé à l’international. Personne n’a demandé à prolonger le service.

 

J’ai demandé à Sékou de m’emmener à Camayenne un quartier au nord de Conakty pour acheter quelques cadeaux. J’avais noté dans le guide LonelyPlanet et dans celui du Petit Futé une adresse: le centre d’auto-promotion féminine. Même Monique m’en avait parlé. Pour aller à Camayenne, il faut passer le pont du 8 Novembre qui est en travaux. C’est la une du numéro 5. Il y a aura, à sa place, un échangeur qui fera une sorte de 8. Après le pont, on longe le Camp Boiron, où de nombreuses personnes ont été torturées et tuées sous les régimes précédents.. Sékou me montre la maison qu’il habite. Impossible à trouver le magasin. A chaque carrefour, le poteau électrique est le point de départ d’une toile de branchements sauvages, simples épissures protégées d’un ruban adhésif. Le docteur-président a promis de faire installer des compteurs pré-payés, sur le modèle des téléphones.

 

Retour en ville. Il m’emmène dans une petite boutique non éclairée: boubou, sandales et autres vêtements. Je choisis quelques pièces. Sékou négocie. Je lui donne l’argent en euros, puis revient avec des francs guinéens. Le compte n’y est pas vraiment avec la monnaie qu’il me rend.

 

Retour au Nimba. C’est calme le mercredi. Le journal est fini et n’arrivera que demain. Je pose devant la camionnette du journal avec Alimou, le vieux chauffeur qui dort la plupart du temps. Les autres aussi dorment, surtout Hawa, la secrétaire. Elle pose une grosse paire de lunettes de soleil et se renverse sur son siège. Kadiatou fait des réussites et de temps en temps imprime une lettre. Je n’ai pas compris le travail des deux commerciales, Zénab et Mama Aïssata.

 

Je refait la bibliothèque d’auto-pub. Je grave un CD de tous les documents que j’ai laissé. 13 heures. Sékou me reconduit à l’hôtel. Les policiers règlent la circulation en soufflant dans de petits sifflets en plastique. Rouge, bleu, jaune, c’est selon. Une vingtaine d’hommes prient sur le trotoir.

 

Mon sac est déjà fait depuis ce matin. Il fait trop chaud pour rester dehors. Je n’ai pas envie de plonger dans la piscine. A la télé, Cartouche avec Jean-Paul Belmondo. Ousmanne était passé le matin prendre la note de l’hôtel pour qu’on vienne payer cet après-midi.

 

17 heures. J’appelle. On me répond qu’on n’a pas pu réunir la somme et qu’il faut donc que je paye. 3400 euros. Je paie.

 

Stéphane et Sékou arrivent, montent mes bagages dans la voiture direction l’aéroport. La route est encombrée par tous ceux qui sortent de Conakry. La voie d’en face est vide. C’est le même décor que lorsque je suis arrivé. Des baraques, maisons ou boutiques, ou les deux. Des femmes autour d’un puits remontent l’eau à la main. Des chèvres paissent ce qui reste d’herbe sur l’ancienne voie de chemin de fer. Sékou slaloment évitant les «taxivite» et les mini-bus. Arrêt pour faire le plein d’essence. La voiture est assaillie de vendeurs. Un 4L Renault subit sa énième réparation. Comment peut-elle encore rouler?

 

Enfin l’aéroport. Nous avons mis deux heures, mais je suis à l’heure. Je laisse un billet de 50 euros à Sékou. Au comptoir, l’hôtesse ne trouve pas trace de mon billet et m’invite à aller au bureau Air-France. Je suis le cinquième dans la liste. Devant moi un monsieur qui négocie un départ mais doit acheter le billet, trois brésiliennes qui veulent changer leur billet pour rester 8 jours à Paris. L’hôtesse tapote son ordinateur. Le numéro que j’ai, est une réservation qui a été annulée. Il reste des places en Business, aller-simple: 3 900 euros. Ma carte Visa ne passe pas. Avec l’hôtel, j’ai du dépasser mon plafond.

 

Je n’ai plus de téléphone, le mien ne capte plus. Le monsieur est revenu avec une énorme liasse de billets. J’hésite quelques secondes et j’emprunte le téléphone de mon voisin qui s’est mis à compter l’argent. J’appelle Stéphane.

 

Je redescends dans l’aéroport. Si les embouteillages sont toujours aussi denses, Sékou ne sera pas de retour avant une bonne heure. J’essaie de lire. Je grignote les sucettes de maïs achetées au bord de la route. Sucré et bourratif. Un petit garçon s’assoit sur mon caddie et joue avec mon sac. Je souris

 

C’est à ce moment là que ça a commencé. C’est monté comme une vague. Mes mains ont tremblés, mes yeux embués. Je suis sorti. Sékou venait d’arriver. Dans la voiture, je n’ai pas pu me retenir. Nous n’avons pas échangé un mot pendant le retour. Dans le quartier de Tombo, à l’entrée de Conakry, un camion immatriculé 39 annonce «Dans le Jura, je trie»

 

Je frappe à la porte de Stéphane. Je n’arrive à prononcer un mot. Tu connais la suite. Je descends dîner. La barrette de Lexomil et la bière font leur effet. Comme je n’ai plus de chambre, j’ai dormi dans le même lit que Stéphane.

Jeudi 30 juin

 

Stéphane dort encore. Je me lève sans bruit. Impossible de capter le Wifi de l’hôtel. Je remonte. Le téléphone sonne. C’est Thuy: j’ai un vol ce soir. Pendant le petit déjeuner, Stéphane m’apprend que le Nimba n’a pas été embarqué à Casablanca. Trop de passagers avec trop de bagages. De toute façon, m’avouera-t-il plus tard, l’argent pour le dédouanement n’était pas prêt.

 

Au Nimba, c’est l’étonnement. de me voir encore là. Je peux envoyer quelques mails, passe 3/4 heure au téléphone avec un technicien d’o2i pour essayer de re-connecter l’imprimante au réseau. Le panne d’électricité,qui va durer jusqu’à mon départ vers 16 heures, vient tout interrompre. A nouveau plus de mail et toujours pas de téléphone international.

 

Déjeuner au Damier, à cinq minutes du journal. La carte est plus européenne qu’africaine. Le café n’est pas l’expresso attendu. Le Damier est aussi une pâtisserie. J’achète un paquet de meringue. J’espère qu’elles resteront entières jusqu’à Paris. Pounthioun le rédacteur en chef, comme tous les autres journalistes, a reçu une carte de presse «maison». La sienne porte le numéro 4; celle d’Ougna, appelé «Le Jeune», le numéro 3. Il peste contre cette inversion de la hiérarchie. C’est moi qui a fait le fichier en attribuant les numéros dans l’ordre de création du fichier. J’ai réservé le numéro à 1 à Jean Miot.

 

Le comité de rédaction commence à l’heure. Deux journalistes (la moitié de l’effectif) sont sur le terrain. Nous sommes le 30 juin, et les salaires n’ont pas été versé. On discute avances sur salaires, remboursements de frais d’essence les soirs de bouclage. Je reparle de la nécessité d’étaler la fabrication de pages, soutenu par Sidibé qui rappelle qu’il est venu trois jours de suite sans monter de pages. Stéphane envenime la discussion en concluant son intervention par un «point-barre» ce qu’il vaut une réponse cinglante de Niane qui, à mots à peine voilés, lui rappelle que «ce temps-là» est révolu.

 

16 heures je re-fais mes adieux. Sékou est introuvable. L’ascenseur est en panne. Je remonte les 7 étages pour qu’on appelle le chauffeur. Je redescends en nage. Même paysage sur le chemin de l’aéroport, moins encombrée qu’hier. Au centre de la route et des deux côtés, ce que proposent les dizaines de vendeurs à la sauvette est un véritable inventaire à la Prévert: rasoirs, cafetières, coupe-coupe, sandales, produits à vaisselle, confiseries diverses, cartes de téléphones, coupes-haie, serviettes de bain, pochettes d’eau de forage, conton-tiges, multi-prises électrique artisanales…

 

La même hôtesse qu’hier valide mon billet. Il reste l’immigration, la fouille, la douane. Dans la salle d’embarquement, j’emprunte le téléphone d’un monsieur. L’émotion m’envahit. J’ai du mal à parler. J’avale un Lexomil et me remets à écrire. L’avion enfin. Décollage. Escale à Nouakchott.

Chaque siège possède un écran. Je pense que je vais dormir.

Il me reste une carte de presse du Nimba, 70.000 GNF, quelques photos et celles que j’ai emprunté aux journalistes, une expérience de travail passionnante avec des gens d’une grande gentillesse avec qui j’ai pu avoir de d’interressantes discussions et la confirmation que je n’avais rien à attendre de ma boîte. Avant la coupure de courant, j’ai téléchargé le formulaire de départ à la retraite.

 

 

Rédaction

 

Daouda Tamsir Niane – Directeur de la rédaction

Pounthioun Diallo – Rédacteur en chef

Naby Moussa Camara – Reporter

Monique Curtis – Reporter

Ougna Elie Camara - Reporter

Ahmed Emmanuel Cissé – Chef du montage

Mamady Sidibé - Adjoint montage

Administratif

 

Mohamed Kaba Keïta – Administrateur général

Alimou Kouyaté - Chauffeur

Ousmane Camara - Logistique

Zénab Samoura - Commercial

Mama Aïssata Kallo - Commercial

Hawa Barry - Secrétaire

Bandjougou Keïta - Logistique

Madéra Kourouma - Inspecteur des ventes

Kadiatou Simakan - Commercial